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Souvenirs de Campagne - Grande Guerre 14-18
17 octobre 2014

la bataille de l'Yser commence

Deuxième quinzaine d’octobre 1914

Pendant que Lucien se morfond sur son lit d’hôpital militaire de Creil, les opérations continuent sur le terrain, dans le Nord qu’il vient de quitter. J’ai choisi de décrire la bataille de l’Yser, en raison de deux documents en ma possession.

La bataille de l’Yser[1] est l'appellation donnée à l'ensemble des combats qui se sont déroulés du 17 au 31 octobre 1914 et qui ont opposé les unités allemandes qui voulaient franchir le fleuve en direction de Dunkerque aux troupes belges et françaises qui essayaient de les y arrêter. Une vaste inondation, déclenchée fin octobre, a réussi à stopper définitivement la progression des assaillants.

L'Yser est un petit fleuve côtier de 78 km de long qui prend sa source en France, qui entre en Belgique après quelque 30 km et qui y décrit un arc de cercle avant de se jeter dans la mer du Nord à Nieuport. A Fort Knokke (ancien fort), il reçoit, venant d'Ypres, son affluent canalisé l'Yperlé. Sur le plan militaire, l'Yser ne constitue pas un obstacle important car la rivière n'est ni large (15 m environ) ni encaissée.

C'est plutôt l'ensemble de la région qui n'est guère favorable aux opérations militaires car il s'agit d'une plaine sillonnée par de nombreux canaux d'irrigation et ne comportant que de rares couverts: quelques petits villages et des fermes isolées. Il y est impossible de creuser des tranchées car l'eau affleure directement. Les tranchées de l'Yser seront le plus souvent construites au-dessus du sol en empilant des sacs de terre.

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La Bataille de l'Yser par P. Madeline, in La Guerre de 1914-1915 (coll. pers.)

Les centres urbains sont Nieuport et Dixmude sur l'Yser et Furnes en arrière. Un remblai supportant le chemin de fer entre Nieuport et Dixmude aura, pour la bataille, une importance capitale.

Tout le long de la côte, un cordon de dunes renforcé le long de la plage d'une digue datant du xive siècle empêche l'envahissement de la mer car, lors des marées hautes, la plaine se situe sous son niveau; il s'agit de polders. A Nieuport, un système complexe d'écluses et de déversoirs sert à réguler les niveaux des eaux intérieures. C’est justement ce mécanisme qui permettra de provoquer volontairement l’inondation afin d’interrompre l’avancée de l’ennemi.

Cette bataille de l’Yser est importante pour une raison : elle marque, à proprement parler, le début de la guerre des tranchées.

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L'Yser, aquarelle de Georges Scott (reproduction, coll. pers.)

Georges Bertin, dit Scott de Plagnolle, est né à Paris le 10 juin 1873. Scolarisé à l’école alsacienne, il consacre une grande partie de son temps libre au dessin : « J’ai toujours dessiné  (…). Mon père était peintre et illustrateur. Je suis né dans un atelier  » déclarait-il plus tard. Orphelin de père en 1884, Georges Scott présente, suivant les conseils de certains de ses proches, ses croquis et dessin à Paul Déroulède, président de la Ligue des patriotes. Cette rencontre marque le début de la carrière artistique de Scott. Il étudie aux Beaux-Arts et devient l’un des disciples du grand peintre militaire Edouard Detaille.

Au début des années 1890, il propose à l’Illustration  un article et des croquis réalisés au moment des attentats anarchistes. René Baschet, directeur de l’hebdomadaire, est séduit par ces travaux. Il engage Scott qui entame alors une carrière de reporter, d’illustrateur et de peintre à la rédaction de l’Illustration .

« J’ai suivi pendant une grande partie de ma vie tous les événements importants qui se sont produits, mais rien ne vaudra pour moi les années où, comme correspondant de l’Illustration, j’étais constamment susceptible de partir aux quatre coins du monde  (…) ».

Pendant les guerres balkaniques, il effectue trois séjours dans les Balkans entre 1911 à 1913. Il sillonne notamment la Thrace avec l’armée bulgare, où il découvre les horreurs de la guerre. Puis, à la nouvelle de la chute d’Andrinople le 26 février 1913, il est envoyé à nouveau dans les Balkans par l’Illustration  et arrive à Andrinople le 2 avril 1913, en compagnie de Messimy, ancien ministre de la Guerre, et de Bénazet, rapporteur de la commission de l’Armée.

« Le spectacle le plus atroce qu’il m’ait été donné de voir est sans contredit l’ile de Maritza en face d’Andrinople, pendant la campagne balkanique et après la prise d’Andrinople. La garnison turque de cette ville qui avait subi neuf mois de siège était littéralement épuisée, les vivres manquaient depuis longtemps et le nombre de ces malheureux prisonniers était environ de 12 000 (toute la garnison). (…) Le choléra, le typhus, la dysenterie, toutes les maladies épidémiques s’étaient abattues sur ces malheureux. Lorsque j’arrivai, il y en avait encore 7 à 8 000, les autres étaient déjà morts ou avaient été massacrés ; l’horrible c’est que ces hommes avaient été mis là sans abri, sous la pluie et sans nourriture d’aucune sorte ; ils en étaient arrivés à décortiquer les arbres, dont ils mangeaient les écorces  ».

A l’été 1914, Scott prépare un portrait de Djamal Pacha (1872-1922) à Constantinople. A la mobilisation, il rentre en hâte à Paris et rejoint son affectation de mobilisation. Il gagne l’Alsace pour rendre compte des mouvements de l’armée française. Ses premiers dessins, dont le fameux « On ne passe pas ! », paraît en première de couverture de l’Illustration le 8 août 1914. Ils exaltent le patriotisme et doivent inspirer au lecteur une totale confiance dans l’armée et le sentiment d’une victoire rapide. Correspondant de guerre, Georges Scott parcourt les champs de bataille (Vieil-Armand, Ypres, Somme, Champagne) pour rendre compte dans l’Illustration  de ce qu’il voit par le dessin ou l’écriture. Il est à Verdun à partir du 21 février 1916 où il demeure pendant presque toute l’année. En 1917, il visite le front britannique puis le front italien qu’il ne quitte qu’en 1918. Il a ainsi décrit les violents combats dans les Dolomites.

Employé en qualité de correspondant de guerre pour l’Illustration  et peintre aux armées à partir de 1916, Scott offre une vision idéalisée de la guerre, épurée et patriotique, tout à la gloire du soldat français. Toutefois, il donne progressivement une image de plus en plus noire d’une guerre qui dévore toujours plus d’hommes. Les soldats vêtus des uniformes chamarrés de l’armée française au début de la guerre cèdent la place à des ombres moribondes, que rien ne distingue plus de la boue, de l’épouvante et de la mort. Scott photographie, écrit, dessine et peint la Grande Guerre. Son œuvre est un hommage rendu à la grande souffrance du soldat, à sa résignation et à son héroïsme, dont la péroraison est magnifiée par l’huile représentant les soldats morts au champ d’honneur et participant au macabre défilé de la victoire.

Après la guerre, Georges Scott reprend ses activités de journaliste au journal l’Illustration  mais il collabore aussi à « Graphic »  et à « Mame ». Il devient le portraitiste officiel des rois et chefs d’Etat. Il peint le roi d’Angleterre Georges V ou réalise le portrait équestre de Mussolini en 1926. Puis, à partir des années trente, Scott s’isole dans son atelier parisien. Seul, presque reclus, il est meurtri par la défaite de 1940. Le général d’aviation Antonin Brocard (1885-1950), as de la Grande Guerre dans l’escadrille des Cigognes écrit au sujet de Scott : « Sa vie et son œuvre ne l’avaient pas préparé à supporter sans une affreuse souffrance les angoisses du doute de ces vingt dernières années et, pour finir, le désespoir d’un cataclysme national sans précédent dans notre histoire. La défaite est venue et l’a tué  ». Il s’éteint à Paris à l’âge de 70 ans le 14 janvier 1943.

Extraits de Les Ecoles de St Cyr Coëtquidan (http://www.st-cyr.terre.defense.gouv.fr/index.php/Les-ecoles-de-Saint-Cyr-Coetquidan/Actualites/Georges-Scott-peintre-de-la-Grande-Guerre



[1] Les éléments historiques et géographiques sont tirés de Wikipédia (http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_l'Yser )

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Souvenirs de Campagne - Grande Guerre 14-18
  • Vous trouverez ici le Journal de guerre de mon aïeul, le capitaine Lucien Proutaux, écrit du premier au dernier jour de la Grande Guerre (1914-18). Ce journal est publié jour après jour, 100 ans après les événements relatés et a débuté le 1er août 2014.
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