6 Août 1914
6 Août 1914
Le Régiment est au complet, Ce matin, nous avons conduit nos hommes à l’exercice afin de les remettre en main. J’en ai profité pour adresser à ma section les quelques mots suivants :
« Mes Camarades. Maintenant que nous voilà armés, équipés et prêts à partir, il est temps que nous fassions plus ample connaissance et que nous sachions, vous, ce que vous pouvez attendre de moi, et moi, ce que je dois attendre de vous. Pour la plupart, vous êtes Parisiens ; moi également, nous sommes donc faits pour nous comprendre. Je sais que le Parisien n’est pas toujours un modèle de discipline, mais, je sais aussi qu’il n’est pas de soldat plus enthousiaste que lui et je suis bien certain que vous ne ferez pas mentir votre réputation. Tout comme vous, je n’ai pas encore vu le feu… j’ignore donc quelle sera mon attitude en présence de l’ennemi ; mais, je puis vous affirmer que tous mes efforts tendront à vous donner l’exemple du courage et de l’abnégation. Soyez donc assurés que notre place ne sera pas à l’arrière, mais là où l’on reçoit des coups… et surtout là où l’on en donne.
La cause que nous défendons est trop belle, trop légitime et trop juste pour que le Dieu des batailles ne nous accompagne pas et c’est de l’autre côté des Vosges que j’ai le ferme espoir de vous conduire.
En tout cas, vous allez me jurer de toujours me suivre partout où je vous conduirai, car ce sera toujours sur le chemin de l’honneur ! »
Mon petit discours, dit avec l’émotion que l’on pense, ne manque pas de produire son effet et, tous les yeux évidemment tournés vers moi, semblent boire mes paroles. Et pas un seul, parmi ces braves gens, n’est seulement effleuré par l’idée de ne pas prêter le serment que je leur demande.
Tiré de "La Guerre de 1914-15 documentée", par le Lieutenant-Colonel Lemarchand,
N°1 Librairie Schwarz & Cie, 58 rue de la Chaussée d'Antin - Paris IXe - Prix : 1F50